La société de participations financières de profession libérale: un outil juridique attractif au service des pharmaciens

Dans le cadre de l’exercice de leur activité professionnelle au sein d’une société d’exercice libéral (SEL) de pharmaciens d’officine ou de biologistes médicaux, les pharmaciens ont la possibilité de constituer des sociétés de participations financières de profession libérale (SPFPL). Les SPFPL sont des sociétés holding ayant pour objet la détention de parts sociales ou d’actions de SEL, et soumises à des règles spécifiques de répartition de leur capital social. Le recours aux SPFPL va permettre aux pharmaciens de faciliter l’acquisition des titres de SEL – notamment par les jeunes diplômés – ainsi que la transmission et la restructuration de l’activité libérale, compte tenu de l’existence de régimes fiscaux incitatifs.

Abstract

In the framework of their professional activity within the professional partnership (société d’exercice libéral) of retail pharmacists or of medical biologists, pharmacists are able to set up financial partnerships for the liberal professions (SPFPL). The aim of these financial partnerships is to hold shares in the professional partnership (SEL), and the former are subject to specific rules for the distribution of their share capital. Making use of these financial partnerships will enable pharmacists to make not only the purchase of professional partnership equity easier – especially by qualified young people – but also the transfer and the restructuring of the liberal activity, taking into account the existence of tax incentives.

Mots clés

Pharmaciens – Biologistes – Sociétés d’Exercice Libéral (SEL) – Sociétés de participations financières de profession libérale (SPFPL)

Keywords

Retail Pharmacists – Medical Biologists – Professional Partnerships (SEL) – Financial Partnerships for the Liberal Professions (SPFPL)

SOMMAIRE

1. – L’objet des SPFPL

2. – La répartition du capital social des SPFPL

3. – Articulation des règles de détention du capital des SEL et des SPFPL

4. – L’effet de levier des SPFPL

5. – Le régime fiscal des sociétés mères et filiales

6. – Le régime de l’intégration fiscale

7. – La déductibilité des intérêts d’emprunts

8. – Le transfert du passif du pharmacien à la SPFPL

9. – Les SPFPL, structures d’investissement et de gestion patrimoniale

Longtemps attendues par les professionnels de la santé, les sociétés de participations financières de profession libérale (SPFPL) connaissent aujourd’hui un certain engouement chez les pharmaciens exerçant leur activité professionnelle tant au sein d’une officine de pharmacie qu’au sein d’un laboratoire de biologie médicale.

Instituées par la loi dite «MURCEF » du 11 décembre 20011 et régies par l’article 31-1 de la loi du 31 décembre 1990 sur les sociétés d’exercice libéral2, ces SPFPL sont constituées sous la condition suspensive de leur inscription au tableau de la section de l’Ordre dont relève le pharmacien concerné (section A, section D ou section G, selon que le pharmacien exerce dans une officine ou un laboratoire, et section E dans tous les cas où l’activité est exercée dans un département ou territoire d’outre-mer).

Si la loi sur les sociétés d’exercice libéral renvoie à la parution d’un décret afin de préciser les conditions d’application de ses dispositions sur les SPFPL, le Conseil d’État a eu l’occasion de rappeler, dans un arrêt du 28 mars 20123, que l’absence de décret d’application ne constituait pas en l’espèce un obstacle à la constitution et l’inscription d’une SPFPL.

C’est notamment la raison pour laquelle, s’agissant des biologistes médicaux, la profession connaît depuis lors une vague d’inscriptions de SPFPL de biologiste médical alors même qu’aucun décret n’a été pris pour cette profession.

À l’inverse, les pouvoirs publics ont adopté, le 4 juin 2013, un décret4 relatif aux conditions d’exploitation d’une officine de pharmacie par une société d’exercice libéral (SEL) et aux SPFPL de pharmaciens d’officine, permettant d’apporter certaines précisions quant à la constitution, au fonctionnement, au contrôle, à la dissolution et la liquidation de ces SPFPL.

Pour autant, le nombre de constitutions de SPFPL de pharmaciens d’officine apparaît plus mesuré que celui constaté pour la profession de biologiste médical, ce qui peut notamment s’expliquer par la représentation minoritaire des SEL comme mode d’exploitation des officines, même si cette tendance est appelée à s’inverser; dans la mesure où l’objet des SPFPL est précisément de prendre des participations dans le capital de SEL, leur existence est mécaniquement subordonnée à celle des SEL.

Bien que les règles applicables aux SPFPL – et plus généralement aux SEL – diffèrent selon que leurs associés sont pharmaciens d’officine ou biologistes médicaux, le recours à ces sociétés holding hybrides, empruntant leur régime juridique tant aux dispositions spéciales qui leur sont respectivement applicables (principalement celles contenues dans le Code de la santé publique) qu’au droit commundes sociétés, constitue un outil juridique particulièrement attractif tendant à faciliter la transmission et la réorganisation de l’activité libérale.

1. L’objet des SPFPL

L’article 31-1 de la loi du 31 décembre 1990, énonce notamment que les SPFPL ont pour objet « (…) la détention des parts ou d’actions de sociétés mentionnées au premier alinéa de l’article 1er ayant pour objet l’exercice d’une même profession ainsi que la participation à tout groupement de droit étranger ayant pour objet l’exercice de la même profession. Ces sociétés peuvent avoir des activités accessoires en relation directe avec leur objet et destinées exclusivement aux sociétés ou aux groupements dont elles détiennent des participations.»

L’objet des SPFPL se rapproche donc de celui des sociétés holding dites classiques, c’est-à-dire les prises de participations capitalistiques, mais est naturellement moins large puisqu’il ne concerne que des SEL.

Ainsi les SPFPL de pharmaciens d’officine ou de biologiste médical sont-elles constituées dans le but de détenir respectivement des parts sociales ou des actions de SEL de pharmaciens d’officine ou de biologistes médicaux, quelle que soit la forme sociale adoptée par ces structures d’exploitation (SELARL, SELAS, SELAFA, SELCA).

Compte tenu des dispositions législatives et réglementaires5 applicables aux SEL de pharmaciens d’officine et de biologistes médicaux, il est précisé qu’une SPFPL de pharmaciens d’officine ne peut détenir des parts sociales ou des actions d’une SEL de biologistes médicaux et, réciproquement, qu’une SPFPL de biologiste médical ne peut détenir des parts sociales ou des actions d’une SEL de pharmaciens d’officine.

S’agissant des activités accessoires, sont notamment concernés les services et l’assistance qui pourraient être facturés à la SEL dont la SPFPL est associée ou actionnaire.

2. La répartition du capital social des SPFPL

Les règles de répartition du capital social applicables à toutes les SPFPL sont également édictées par l’article 31-1 susvisé, lequel dispose:

«Plus de la moitié du capital et des droits de vote doit être détenue par des personnes exerçant la même profession que celle exercée par les sociétés faisant l’objet de la détention des parts ou actions.

Le complément peut être détenu par les personnes mentionnées aux 2°, 3° et 5° de l’article 5.

Toutefois, des décrets en Conseil d’État, propres à chaque profession, pourront interdire la détention, directe ou indirecte, de parts ou d’actions représentant tout ou partie du capital social non détenu par des personnes visées à l’alinéa précédent, à des catégories de personnes physiques ou morales déterminées, lorsqu’il apparaîtrait que cette détention serait de nature à mettre en péril l’exercice de la ou des professions concernées dans le respect de l’indépendance de ses membres et de leurs règles déontologiques propres.»

Concernant les pharmaciens biologistes médicaux, la loi impose donc que le capital social et les droits de vote des SPFPL de biologiste médical soient majoritairement détenus par des biologistes médicaux et/ou des SEL de biologistes médicaux, le complément pouvant être détenu:

• pendant une durée de dix ans à compter de leur cessation d’activité professionnelle, par des personnes physiques qui ont exercé la profession de biologiste médical;

• par les ayants droit des personnes physiques visées ci-dessus, pendant une durée de cinq ans suivant le décès de celles-ci.

Dès lors, si le principe posé par la loi est celui de la détention de la majorité du capital et des droits de vote de la SPFPL de biologiste médical par des personnes exerçant la même profession que celle de la SEL de biologistes médicaux dont la SPFPL détient des parts ou des actions, ces mêmes personnes ne doivent pas nécessairement exercer leur profession dans ladite SEL de biologistes médicaux.

Cette dernière affirmation pourrait être tempérée par le décret d’application sur les SPFPL de biologiste médical, lorsqu’il paraîtra.

S’agissant des pharmaciens d’officine, la combinaison des mêmes dispositions législatives avec celles du décret du 4 juin 2013 codifié6 permet de comprendre que le capital social et les droits de vote des SPFPL de pharmaciens d’officine doivent être majoritairement détenus par des pharmaciens titulaires et/ou des pharmaciens adjoints et/ou des SEL de pharmaciens d’officine, le complément
pouvant être détenu:

• pendant une durée de dix ans à compter de leur cessation d’activité professionnelle, par des personnes physiques qui ont exercé la profession de pharmacien d’officine au sein de l’une des SEL dont la SPFPL de pharmaciens d’officine est associée ou actionnaire;

• par les ayants droit des personnes physiques visées ci-dessus, pendant une durée de cinq ans suivant leur décès.

Ceci étant précisé, ces règles de détention du capital social et des droits de vote des SPFPL de pharmaciens d’officine et de biologistes médicaux doivent être conjuguées avec celles applicables aux SEL.

3. Articulation des règles de détention du capital des SEL et des SPFPL

La loi du 31 décembre 19907 instaure des règles communes de détention du capital social des SEL applicables tant aux SEL de pharmaciens d’officine qu’aux SEL de biologistes médicaux; il existe par ailleurs des règles propres à chacune de ces SEL, selon que leurs associés exercent l’activité professionnelle de pharmacien d’officine8 ou de biologiste médical9.

Le principe posé par la loi est celui de la détention majoritaire du capital social et des droits de vote d’une SEL par l’ensemble des associés exerçant leur activité professionnelle dans ces sociétés.

Il importe de préciser que, tant pour les pharmaciens d’officine10 que pour les biologistes médicaux11, sont inapplicables les dispositions visées au premier alinéa de l’article 5-1 de la loi du 31 décembre 1990 selon lesquelles il peut être dérogé au principe majoritaire précédemment énoncé dès lors que les associés professionnels en exercice au sein de la SEL conservent ensemble plus de la moitié des droits de vote12.

En application de cette dérogation, il était aisé de créer une distorsion entre quotité de capital et droits de vote détenus par les associés ou actionnaires d’une SEL de telle sorte qu’une SEL de biologistes médicaux détienne, par exemple, 99,99% du capital social et 49,99% des droits de vote d’une autre SEL de biologistes médicaux…

Considérant que cette situation était de nature à porter atteinte à l’indépendance des pharmaciens d’officine et des biologistes médicaux minoritaires en capital, les pouvoirs publics et le législateur ont décidé, pour ces professions, d’écarter la possibilité de déroger aux prescriptions du premier alinéa de l’article 5 de la loi du 31 décembre 1990 qui prévoit que: «Plus de la moitié du capital social et des droits de vote doit être détenue, directement ou par l’intermédiaire des sociétés mentionnées au 4° ci-dessous, par des professionnels en exercice au sein de la société. »

Ceci étant rappelé, la loi offre néanmoins la possibilité à une SPFPL de pharmacien d’officine ou de biologiste médical de détenir plus de la moitié du capital social et des droits de vote d’une SEL puisque les SPFPL figurent parmi les sociétés mentionnées au 4° de l’article 5 susvisé.

Du point de vue des pharmaciens d’officine et des biologistes médicaux, la détention de plus de la moitié du capital social et des droits de vote d’une SEL, au sein de laquelle ils exercent leur activité professionnelle, «par l’intermédiaire» d’une SPFPL laisse entendre que ces professionnels doivent détenir plus de la moitié du capital social et des droits de vote de cette SPFPL.

C’est la raison pour laquelle la quotité de capital d’une SEL pouvant être détenue par une ou plusieurs SPFPL de pharmacien d’officine ou de biologiste médical doit s’apprécier à l’aune de la répartition du capital social et des droits de vote de ces mêmes SPFPL.

Ainsi une SPFPL de biologiste médical peut-elle valablement détenir plus de la moitié (et jusqu’à 99,99%) du capital social et des droits de vote d’une SEL de biologistes médicaux dès lors qu’il existe une identité entre les biologistes médicaux exerçant leur activité professionnelle dans ladite SEL et ceux détenant majoritairement le capital social et les droits de vote de la SPFPL de biologiste médical.

La détention indirecte de plus de la moitié du capital social et des droits de vote d’une SEL par une SPFPL n’interdit nullement à d’autres SPFPL de détenir des parts sociales ou des actions de cette SEL.

Toutefois, si le nombre de participations d’une SPFPL de biologiste médical dans des SEL de biologistes médicaux n’est pas encore limité, il en va différemment pour les SPFPL de pharmacien d’officine qui ne peuvent chacune détenir des participations dans plus de trois SEL de pharmaciens d’officine13.

En outre, la loi14 impose à tous les pharmaciens de détenir au moins 5% du capital social et des droits de vote de la société exploitant une officine au sein de laquelle il exerce son activité professionnelle; cette quote-part du capital social et des droits de vote détenue par chaque pharmacien d’officine doit consécutivement s’imputer sur celle détenue, le cas échéant, par une ou plusieurs SPFPL de pharmacien d’officine.

En conséquence du principe de détention indirecte – par l’intermédiaire d’une SPFPL – de plus de la moitié du capital social et des droits de vote d’une SEL par les pharmaciens d’officine ou les biologistes médicaux y exerçant leur activité professionnelle, il est enfin précisé qu’une SPFPL ne peut détenir plus de la moitié du capital social et des droits de vote que d’une seule SEL, ses participations dans d’autres SEL ne pouvant mécaniquement excéder 49,99% du capital social et des droits de vote.

Compte tenu des nombreuses possibilités de montages juridiques offertes par la constitution d’une SPFPL appelée à détenir des titres d’une ou plusieurs SEL de pharmaciens d’officine ou de biologistes médicaux, ce véhicule d’acquisition dédié aux professionnels libéraux – et notamment aux jeunes pharmaciens –s’avère particulièrement adapté aux opérations de restructuration du capital (notamment lors du retrait d’un ou plusieurs associés) ou de regroupement de SEL, et bénéficie de surcroît d’un traitement fiscal privilégié.

4. L’effet de levier des SPFPL

Chaque pharmacien envisageant l’acquisition de parts ou d’actions d’une SEL, ou encore la souscription à une augmentation de son capital social, doit se poser la question de l’opportunité de la constitution d’une SPFPL ; en effet, la transmission des titres représentatifs du capital social d’une SEL est facilitée par le régime fiscal de faveur dont peut bénéficier une SPFPL, et les conséquences financières qui en résultent sont particulièrement avantageuses notamment pour de jeunes professionnels s’inscrivant dans une démarche associative.

En effet, dans la mesure où l’endettement souscrit pour l’acquisition des parts sociales ou des actions de la SEL cible ne sera plus supporté par le pharmacien lui-même, mais par la SPFPL dont il sera associé ou actionnaire, le désendettement échappera à la pression fiscale du barème progressif de l’impôt sur le revenu.

La charge du désendettement incombera à la SPFPL, et le remboursement de la dette sera assuré par les dividendes distribués par la SEL.

Si les conditions d’éligibilité au régime fiscal de faveur dit des «sociétés mères et filiales » ou encore à celui de l’intégration fiscale sont remplies, les dividendes distribués par la SEL à la SPFPL connaîtront alors une fiscalité singulièrement réduite, voire l’absence d’imposition (d’où l’effet de levier fiscal).

5. Le régime fiscal des sociétés mères et filiales

L’option pour le régime fiscal des sociétés mères et filiales permettra ainsi aux
SPFPL de pharmacien d’officine ou de biologiste médical (sociétés mères) de
bénéficier de l’exonération des dividendes reçus des SEL (sociétés filiales) dont

elles seront associées ou actionnaires, sous réserve de la taxation d’une quote-part de frais et charges.

L’exonération portera sur 95% du montant des produits ainsi distribués par les SEL au profit des SPFPL, la quote-part de frais et charges fixée à 5% dudit montant demeurant incluse dans le résultat des SPFPL et imposable à l’impôt sur les sociétés selon les règles de droit commun.

Pour bénéficier de ce régime fiscal de faveur, les SPFPL devront détenir la pleine propriété de parts sociales ou d’actions représentant au moins 5% du capital d’une SEL, et être conservés pendant au moins deux ans.

Il est précisé que ce seuil de détention fixé à 5% du capital doit s’apprécier tant au regard des droits financiers que des droits de vote au sein de la SEL considérée.

6. Le régime de l’intégration fiscale

Le régime de l’intégration fiscale, dont le bénéfice résultera de l’exercice d’une option par la SPFPL (société mère), est soumis à des conditions d’éligibilité plus strictes que celles applicables au régime des sociétés mères et filiales, mais permettra en revanche une harmonisation financière et fiscale du groupe au niveau du résultat imposable des SPFPL.

Ces conditions d’éligibilité sont notamment les suivantes:

  • le capital de la SPFPL (société mère) ne doit pas être détenu, directement ou indirectement, à 95% au moins, par une autre personne morale soumise à l’impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun;
  • le capital de la SEL (filiale) doit être détenu à 95% au moins, directement ou indirectement, par la SPFPL (société mère)

Il est précisé que la détention de 95% du capital s’entend en l’espèce de la détention en pleine propriété de 95% des droits à dividende et des droits devote, seuil de détention que les SPFPL de biologiste médical peuvent valablement atteindre dans le capital des SEL de laboratoire de biologistes médicaux.

S’agissant des pharmaciens d’officine, le régime de l’intégration fiscale ne pourra s’appliquer que dans la mesure où un seul pharmacien exercera son activité professionnelle au sein de la SEL de pharmaciens d’officine dont il sera associé ou actionnaire; il est en effet rappelé que la loi15 impose, pour tout pharmacien associé exerçant son activité professionnelle au sein d’une SEL exploitant une officine, un seuil minimal de détention de 5% de son capital social et des droits de vote.

Ce régime fiscal permettra notamment de diminuer le résultat imposable des SPFPL du montant des déficits subis, le cas échéant, par les SEL filiales.

De plus, les abandons de créances et les subventions consentis entre sociétés du groupe formé par la SPFPL et sa(ses) SEL filiale(s) pourront être neutralisés pour la détermination du résultat d’ensemble, de même que les plus-values ou moins-values résultant de cessions intragroupes d’immobilisations ou de titres.

En outre, l’intégration fiscale doit permettre au groupe de faciliter le financement des acquisitions de titres de SEL dans la mesure où l’emprunt contracté par la SPFPL pour financer ces acquisitions sera supporté par le groupe, et les intérêts pourront être déduits des bénéfices réalisés par les SEL membres du groupe.

7. La déductibilité des intérêts d’emprunts

Lorsque la SPFPL dégagera des revenus, elles sera autorisée à déduire de son résultat imposable les intérêts des emprunts contractés pour l’acquisition des parts sociales ou des actions des SEL filiales.

Les dividendes distribués à la SPFPL par les SEL filiales assureront le remboursement de ces emprunts, et seront intégrés au résultat de la SPFPL (régime de l’intégration fiscale) ou seront reçus en quasi-franchise d’impôt (régime des sociétés mères et filiales); les intérêts des emprunts constitueront des charges imputables sur les produits taxables de la SPFPL, ces produits étant notamment constitués de l’ensemble des prestations rémunérées à leur juste valeur et facturées aux SEL filiales.

8. Le transfert du passif du pharmacien à la SPFPL

Compte tenu des effets vertueux des régimes fiscaux de faveur précédemment exposés, il peut être tentant, pour le pharmacien ayant souscrit un emprunt bancaire pour acquérir des titres (parts sociales ou actions) d’une SEL, de constituer une SPFPL à laquelle seraient apportés ces titres, et de transférer la charge du passif du pharmacien à la SPFPL.

En principe, l’apport des titres d’une SEL à une SPFPL n’emporte pas de conséquences fiscales indésirables dans la mesure où l’éventuelle plus-value réalisée par le pharmacien à l’occasion de cet apport n’est pas immédiatement taxée.

En effet, cette plus-value va bénéficier, selon les cas, d’un sursis d’imposition (hypothèse dans laquelle le calcul de la plus-value et son imposition sont différés) ou d’un report d’imposition (hypothèse dans laquelle la plus-value est immédiatement constatée, mais son imposition différée) tendant à repousser l’imposition jusqu’à la survenance de l’un des événements suivants:

  • cession, rachat ou annulation des titres de la SPFPL reçus en rémunération de l’apport des titres de la SEL ;
  • en cas de report d’imposition, cession par la SPFPL, rachat, remboursement ou annulation des titres de la SEL apportés, si cet événement intervient dans un délai de 3 ans à compter de l’apport des titres de la SEL à la SPFPL (à moins que la SPFPL réinvestisse au moins 50% du produit de cession des titres de la SEL apportés).


La neutralisation fiscale d’un tel apport de titres procède de l’idée selon laquelle l’apporteur (le pharmacien en l’espèce) ne doit pas être taxé puisqu’il ne perçoit pas de liquidités.

Qu’en est-il du traitement fiscal du transfert de son passif personnel ?
S’agissant d’abord des droits d’enregistrement, l’apport des titres d’une SEL à la SPFPL assorti d’une prise en charge du passif du pharmacien par la SPFPL est considéré comme un apport dit «mixte», qui rend exigible un droit de mutation à titre onéreux liquidé sur le montant de ce passif.

Ainsi, en cas d’apport d’actions composant le capital social d’une SEL au profit d’une SPFPL, le passif pris en charge par la SPFPL rendra exigible le droit de mutation applicable aux cessions d’actions au taux de 0,10%; sont concernées les SEL dont le capital social est divisé en actions (sociétés d’exercice libéral par actions simplifiées, sociétés d’exercice libéral en commandite par actions ou encore sociétés d’exercice libéral à forme anonyme).

En cas d’apport au profit d’une SPFPL de parts sociales composant le capital social d’une SEL ayant adoptée la forme de société d’exercice libéral à responsabilité limitée, le passif pris en en charge par la SPFPL rendra exigible le droit de mutation applicable aux cessions de parts sociales au taux de 3%; par conséquent, selon l’importance du passif transmis, le droit de mutation exigible ne doit pas être négligé.


Concernant la plus-value dégagée par le pharmacien lors de l’apport de ses
titres de SEL à la SPFPL, son sursis ou son report d’imposition est notamment subordonné, en cas d’apport avec soulte, à la condition que cette soulte n’excède pas 10% de la valeur nominale des titres de la SPFPL reçus en rémunération de l’apport.

Cette règle appelle quelques précisions; si la soulte s’entend généralement
d’une somme d’argent à percevoir par l’apporteur lors de l’apport de ses titres de la SEL à la SPFPL, la prise en charge par la SPFPL d’un passif de l’apporteur est, d’un point de vue fiscal, assimilable à une soulte de nature à remettre en cause le sursis ou le report d’imposition.

La remise en cause de la neutralité fiscale de l’opération d’apport impliquerait alors que le pharmacien s’acquitte de l’impôt sur la plus-value réalisée lors de l’apport de ses titres de la SEL à la SPFPL, sans avoir perçu de liquidités…

C’est la raison pour laquelle il est indispensable de vérifier que le passif transmis par le pharmacien n’excède pas 10% de la valeur nominale des titres de la SPFPL qu’il reçoit en rémunération de son apport.

Dans la mesure où la constitution de la SPFPL procède de l’apport des titres de la SEL (cas le plus fréquent), la valeur nominale des titres de la SPFPL va coïncider avec la valeur nette des titres de la SEL apportés (c’est-à-dire la valeur des titres de la SEL apportés, minorée du passif transmis à la SPFPL).

Par conséquent, l’intérêt de l’opération d’apport de titres assortie d’un transfert de passif du pharmacien sera singulièrement limité lorsque le montant du passif transmis à la SPFPL excédera 10% de la valeur des titres de la SPFPL reçus par le pharmacien à l’occasion de l’apport des titres de la SEL.

Dans l’hypothèse où le pharmacien souhaiterait néanmoins solder son endettement personnel, l’alternative pourrait évidemment consister à céder tout ou partie des titres de la SEL dont il est associé ou actionnaire au profit de la SPFPL, celle-ci s’endettant corrélativement afin d’acquérir ces titres, puis remboursant l’emprunt souscrit dans les conditions précédemment exposées.

Toutefois, cette opération de cession générant habituellement une plus-value taxable, il conviendra de s’assurer que le produit de cession couvre non seulement le passif personnel à rembourser par anticipation – le cas échéant avec quelques pénalités –, mais encore le montant de l’impôt à acquitter.

Si à l’occasion de cette opération de cession, le pharmacien n’a pas cédé l’intégralité de ses titres de la SEL, la capacité de désendettement de la SPFPL pourrait être renforcée par l’apport des titres de la SEL non cédés à la SPFPL (moyennant la conservation de 5% du capital pour chaque pharmacien d’officine); la SPFPL pourrait alors prétendre à une plus grande quotité de dividendes distribués par la SEL et destinés au remboursement de l’emprunt souscrit pour le rachat des titres de cette SEL.

9. Les SPFPL, structures d’investissement et de gestion patrimoniale

Les SPFPL constituent non seulement les structures d’acquisition privilégiées des titres de SEL, mais encore de parfaits outils de gestion patrimoniale.

À cet égard, et à titre non limitatif, il convient de rappeler que:

  • les SPFPL permettent d’optimiser le retrait des associés d’une SEL dans la mesure où ces derniers auront, préalablement à leur cession, apporté les parts sociales ou les actions qu’ils détenaient au profit d’une SPFPL (régime des apports-cessions); les SPFPL seront alors considérées comme des «tirelires » permettant le réinvestissement du produit de cession, conformément à leur objet social, et atténuant les frictions fiscales de la cession;
  • les dividendes versés aux SPFPL par les SEL échappent aux cotisations sociales obligatoires, alors que les dividendes excédant certains seuils et versés aux pharmaciens d’officine ou aux biologistes médicaux associés ou actionnaires d’une SEL y sont assujettis;
  • les SPFPL permettent la réalisation d’investissements immobiliers fiscalement attractifs dans la mesure où le droit de propriété des biens immobiliers fera l’objet d’un démembrement entre les SPFPL, qui bénéficieront de l’usufruit temporaire des biens immobiliers, et les associés ou actionnaires desdites SPFPL, qui conserveront la nue-propriété de ces mêmes biens;
  • les SPFPL permettent la réalisation d’investissements financiers, tels que la souscription à des contrats de capitalisation et l’acquisition de portefeuilles de titres;
  • le mécanisme des donations avant cession pourra s’appliquer aux parts sociales ou actions des SPFPL détenues par les pharmaciens d’officine et les biologistes médicaux; les opérations de donation réalisées avant la cession permettront ainsi de «gommer » fiscalement toutes les plus-values latentes au jour de la donation.

Ainsi l’attractivité de la SPFPL semble-t-elle indiscutable, notamment pour les jeunes pharmaciens ou biologistes désirant bénéficier des effets vertueux de ce véhicule d’acquisition en vue de la réalisation d’investissements professionnels coûteux.

La question de la sortie des SPFPL du capital des SEL ne doit pas être éludée
pour autant, dans la mesure où elle est génératrice d’interrogations fiscales pour ceux des professionnels qui, anticipant leur cessation d’activité, auront apporté leurs titres de SEL à une SPFPL.

Au-delà de ses intérêts juridiques, fiscaux et patrimoniaux, la SPFPL peut présider à la constitution et au développement de réseaux régionaux voire nationaux de SEL, et générer d’importantes synergies entre les professionnels libéraux.

L’association de ces professionnels au sein d’une SPFPL matérialisera dès lors une union capitalistique et financière, nécessitée notamment par l’importance des efforts exigés de chaque profession par les pouvoirs publics, tandis que l’exercice de leur activité au sein des SEL demeurera le gage de leur indépendance.


1. Loi n°2001-1168 du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier. (Retour au texte 1)
2. Loi n°90-1258 du 31 décembre 1990 relative à l’exercice sous forme de sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé et aux sociétés de participations financières de professions libérales. (Retour au texte 2)
3. Conseil d’État, 1re et 6e sous-sections réunies, 28/03/2012, 343962, publié au Recueil Lebon. (Retour au texte 3)
4. Décret n° 2013-466 du 4 juin 2013 relatif aux conditions d’exploitation d’une officine de pharmacie par une société d’exercice libéral et aux sociétés de participations financières de profession libérale de pharmaciens d’officine. (Retour au texte 4)
5. Articles L.6223-5 et R.5125-19 du Code de la santé publique. (Retour au texte 5)
6. Articles R.5125-24-1 et suivants du Code de la santé publique. (Retour au texte 6)
7. Articles 5 et 5-1 de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990. ((Retour au texte 7)
8. Article L.5125-17 et articles R. 125-14 et suivants du Code de la santé publique. (Retour au texte 8)
9. Articles L.223-1 et suivants du Code de la santé publique. (Retour au texte 9)
10. Article R.5125-18-1 du Code de la santé publique. (Retour au texte 10)
11. Article L.6223-8 du Code de la santé publique. (Retour au texte 11)
12. Article 5-1 alinéa 1er de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 : « Par dérogation au premier alinéa de l’article 5, plus de la moitié du capital social des sociétés d’exercice libéral peut aussi être détenue par des personnes physiques ou morales exerçant la profession constituant l’objet social ou par des sociétés de participations financières de professions libérales régies par le titre IV de la présente loi.» (Retour au texte 12)
13. Article R.5125-18 du Code de la santé publique. (Retour au texte 13)
14. Article L.5125-17 du Code de la santé publique. (Retour au texte 14)
15. Article L.5125-17 du Code de la santé publique. (Retour au texte 15)