Rémunération associés SEL

A la suite de la mise à jour de la doctrine administrative relative à l’imposition des rémunérations des associés de SEL, l’administration a récemment mis à jour la base BOFIP pour apporter de nouvelles précisions [1].

Le 15 décembre 2022, l’administration fiscale a mis à jour sa base BOFIP pour considérer, qu’en l’absence de lien de subordination, les associés d’une SEL sont imposés, au titre de l’exercice de leur activité libérale dans cette SEL, dans la catégorie des BNC.

Pour les gérants majoritaires de SELARL et les gérants de SELCA, ces règles s’appliquent aux rémunérations allouées à raison de l’exercice d’une activité libérale, lorsqu’elles peuvent être distinguées des rémunérations qu’ils perçoivent au titre de leurs fonctions de gérant. Dès lors, la rémunération des fonctions techniques des associés est imposée dans la catégorie des BNC et la rémunération des fonctions de la gérance est imposée en application de l’article 62 du CGI.

Pour mémoire, l’administration fiscale considérait auparavant que les associés de SEL devaient déclarer leur rémunérationconformément aux dispositions de l’article 62 du CGI pour les associés gérants majoritaires de SELARL et de SELCA, ou dans la catégorie des traitements et salaires pour les associés de SELAS et SELAFA, sans pour autant relever des dispositions de l’article 62 du CGI (sous-catégorie des traitements et salaires).

Cette nouvelle doctrine ayant soulevé de nombreuses interrogations, l’administration fiscale a apporté des précisions à plusieurs reprises, notamment lors d’une dernière publication le 24 avril 2024.

  • Sur la liste des charges déductibles par les associés de SEL imposés dans la catégorie des BNC, les charges déductibles sont celles admises dans les conditions de droit commun. L’administration précise toutefois qu’il appartient aux associés concernés de s’assurer que les dépenses sont bien exposées à raison des fonctions techniques et ne sont pas des charges qui devraient être supportées par la SEL dans le cadre de son exploitation. Ainsi, les frais exposés en lien avec la clientèle de la SEL sont déductibles du résultat de la SEL et non pas par ses associés.

A l’inverse, les frais de transport entre le domicile et le lieu d’activité sont, en règle générale, inhérents aux fonctions techniques et sont admis en déduction par l’associé de SEL.

  • S’agissant des primes afférentes à un contrat Madelin ou à un plan d’épargne retraite, l’administration précise que si elles sont prises en charge par la SEL, au nom et pour le compte de l’associé, elles constituent pour ce dernier une recette accessoire ayant un lien direct avec l’exercice de sa profession et viennent majorer, pour le même montant, son résultat imposable dans la catégorie des BNC.
  • Concernant les cotisations obligatoires et facultatives, si elles sont supportées par l’associé de SEL imposable dans la catégorie des BNC, il peut procéder à la déduction de ces cotisations dans les conditions et limites de droit commun. Également, les cotisations versées au titre d’un contrat Madelin sont déductibles des bénéfices déclarés au titre de l’activité libérale des associés en SEL, dès lors que leur rémunération est déclarée dans la catégorie des BNC.

Il est rappelé que les cotisations acquittées au titre des régimes facultatifs d’assurance vieillesse, de prévoyance ou perte d’emploi dans le cadre des contrats Madelin ou de régimes facultatifs de sécurité sociale sont soumises au plafonnement prévu à l’article 154 bis du CGI.

L’administration reprend également dans cette mise à jour du 24 avril 2024, ses précisions du 27 décembre 2023, et notamment :

  • Sur l’application du régime du micro-BNC, l’administration précise que « pour l’appréciation du seuil d’application du régime, il convient de retenir la rémunération versée par la SEL, en y réintégrant le cas échéant les dépenses professionnelles de l’associé acquittées en son nom et pour son compte par la SEL, au titre de l’année civile précédente et/ou de la pénultième année, qui auraient été déclarées dans la catégorie des BNC si elles avaient été perçues à compter de 2024. Dès lors, les associés de SEL peuvent, toutes conditions étant par ailleurs remplies, bénéficier du régime micro-BNC à compter de l’imposition des revenus 2024, sous réserve que lesdits revenus tirés de leur activité libérale au titre de l’année de référence n’excèdent pas le seuil prévu au 1 de l’article 102 ter du CGI. »
  • Concernant l’assimilation des entrepreneurs individuels à une entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) [2], l’administration considère qu’un associé de SEL ne peut exercer cette option dans la mesure où il exerce les actes professionnels pour le compte de la SEL et non pas en nom propre et ne répond pas à la définition d’entrepreneur individuel.
  • Concernant les honoraires rétrocédés par une SEL à une SPFPL dont l’associé exerce son activité dans la SEL, l’administration précise que lorsqu’ils sont versés au titre de l’activité professionnelle au sein de la SEL, cette rémunération relève de la catégorie des BNC.
  • S’agissant de l’assujettissement à la TVA des associés de SEL, l’administration fiscale confirme que la rémunération des associés de la SEL n’entre pas dans le champ d’application de la TVA dans la mesure notamment où c’est la SEL qui exerce la profession par l’intermédiaire de ses associés, qu’elle est seule à en supporter le risque économique, et que les associés ne sont pas directement en rapport juridique avec les clients.
  • Sur la CFE (cotisation foncière des entreprises), l’administration rappelle que les SEL exerçant une activité libérale, elles sont imposables à la CFE dans les conditions de droit commun tandis que l’associé de SEL lui, n’est pas redevable de la CFE (sauf s’il exerce une activité distincte de celle exercée dans la SEL).

Les précisions de l’administration fiscale apportent des éclaircissements aux associés de SEL mais la mise en application de cette nouvelle doctrine pour les revenus 2024 reste complexe. Certaines organisations professionnelles dont le CNB (Conseil National des Barreaux) ont d’ailleurs entamé des actions visant à relancer les discussions avec l’administration fiscale afin de trouver une solution adaptée et/ou introduire toute demande d’abrogation ou recours à l’encontre de cette mise à jour du BOFIP.

[1] BOI-RES-BNC-000136-24/04/2024

[2] Article 1655 sexies du CGI

SARL Convocation irrégulière

Le 29 mai 2024, la Cour de cassation a fixé pour la première fois les deux conditions cumulatives que le juge doit relever pour prononcer la nullité d’une décision de l’assemblée générale des associés d’une SARL convoquée irrégulièrement [1].

Un associé qui détenait 63 % du capital social d’une SARL avait engagé une action en justice pour annuler les décisions prises lors d’une assemblée générale à laquelle il considérait ne pas avoir été convoqué régulièrement.

Pour mémoire, l’article L.223-27 du Code de commerce prévoit que « toute assemblée irrégulièrement convoquée peut être annulée». Cette sanction facultative présentait cependant une difficulté d’application, car aucune condition précise n’était énumérée pour déterminer les circonstances exactes justifiant une telle annulation.

La Cour de cassation retient deux conditions cumulatives, désormais nécessaires pour prononcer la nullité d’une assemblée générale irrégulièrement convoquée :

  • l’irrégularité de la convocation doit avoir effectivement empêché l’associé de participer à l’assemblée, notamment en cas de non réception de la lettre de convocation ou réception tardive ne permettant pas à l’associé de se rendre à l’assemblée ;
  • l’irrégularité doit être de nature à influer sur le résultat du processus de décision. En d’autres termes, il doit être prouvé que l’absence de l’associé a eu un impact déterminant sur les décisions adoptées lors de l’assemblée.

Dès lors, il convient de démontrer qu’il existe une possibilité que, sans l’irrégularité, la décision prise par l’assemblée aurait été différente. Cette démonstration relève d’une appréciation au cas par cas par les juges, qui doivent examiner les circonstances spécifiques de chaque affaire.

En l’espèce, l’associé détenant 63 % du capital social de la SARL, son absence à l’assemblée était nécessairement de nature à influer sur le sens de la décision.

Cette décision apporte une clarification importante en matière de régularité des convocations des assemblées générales de SARL et doit inciter les gérants à la plus grande rigueur en la matière.

[1] Cass.com.29.05.2024 n°21-21.559

Encadrement centres santé

Encadrement centres santé

Un décret du 20 juin 2024 vient enfin d’être publié en application de la loi du 19 mai 2023 visant à améliorer l’encadrement des centres de santé et apporte un certain nombre de précisions.

Pour rappel, à la suite des scandales Dentexia (en 2015) et Proxidentaire (en 2021), une étude de fond sur le fonctionnement des centres de santé avait été diligentée et le rapport issu de cette étude avait donné lieu à une proposition de loi déposée le 18 octobre 2022, puis à l’adoption de la loi du 19 mai 2023 visant à améliorer l’encadrement des centres de santé [1].

A l’occasion de la publication au Journal Officiel du décret du 20 juin 2024 [2], le ministère de la santé a précisé dans son communiqué de presse, que sur les 2.055 centres de santé soumis à la demande d’agrément, 24 centres avaient d’ores et déjà reçu un refus.

Le décret apporte les précisions suivantes :

Au-delà du seuil de 153.000 € de recettes, les centres de santé devront faire certifier leurs comptes par un commissaire aux comptes ; sauf si le centre est exploité par une collectivité territoriale et que l’activité du centre n’est pas individualisée au sein d’un budget annexe.

Le dossier de demande d’agrément, à déposer auprès de l’ARS via une plateforme dématérialisée prévue par arrêté [3], doit comprendre :

  • Le projet de santé ;
  • Les déclarations d’intérêt conformes au modèle de l’arrêté qui :
    • feront l’objet d’un traitement de données à caractère personnel, auxquelles seuls les agents de l’ARS auront accès ;
    • devront être complétées et/ou modifiées auprès de l’ARS pour toute modification substantielle, et toute modification susceptible d’avoir une incidence sur la politique menée par le centre en matière de qualité et de sécurité des soins ;
  • Les contrats liant l’organisme gestionnaire à des sociétés tierces énumérées dans la déclaration d’intérêt, à l’exclusion de tous les contrats issus de la commande publique ;
  • Le règlement de fonctionnement du centre.

Les données du répertoire national des décisions de suspension ou de fermeture seront partagées entre l’ARS, la DGOS et les CPAM.

S’agissant des comités dentaires ou médicaux, les règles de composition et de prise de décisions sont détaillées par le décret.

Les membres du comité ne peuvent ainsi détenir de droits sociaux ni exercer de fonctions dirigeantes au sein du centre de santé qui les salarie ou de son organisme gestionnaire.

Par ailleurs, des membres d’associations de patients agréées peuvent être invités à siéger au comité, sans voix délibérative.

Les montants des amendes administratives et d’astreintes journalières pouvant être infligées par l’ARS ont été fixés selon un barème.

Ainsi, sont encourues les amendes et astreintes suivantes :

  • € 50.000 d’amende et € 500 d’astreinte pour une violation de l’obligation de transmission de certaines pièces,
  • jusqu’à € 500.000 d’amende et € 5.000 d’astreinte en cas de manquement compromettant la qualité ou la sécurité des soins, ou en cas de fraude.

Pour plus de précisions sur l’encadrement des centres de santé dentaire, ophtalmologique et orthoptique, n’hésitez pas à vous reporter à notre newsletter du mois de juillet 2023 parue à l’occasion de l’adoption de la Loi du 19 mai 2023 visant à améliorer l’encadrement des centres de santé.

[1] Loi n° 2023-378 du 19 mai 2023 visant à améliorer l’encadrement des centres de santé

[2] Décret n°2024-568 du 20 juin 2024 visant à améliorer l’encadrement des centres de santé

[3] Arrêté du 20 juin 2024 modifiant l’arrêté du 27 février 2018 relatif aux centres de santé

téléconsultation

téléconsultation

Le décret du 29 février 2024 n° 2024-164 relatif aux sociétés de téléconsultation a été publié au Journal Officiel le 1er mars 2024, afin de mettre en œuvre les dispositions de l’article 53 de la loi de financement de la Sécurité sociale n°2023-1250 du 26 décembre 2023, établissant un cadre réglementé régissant la pratique de la téléconsultation.

Pour rappel, la pratique de la télémédecine répond aux mêmes exigences réglementaires et législatives que l’exercice de la médecine en présentiel. Cependant, aucune réglementation n’était, jusqu’à présent, en vigueur s’agissant des sociétés de téléconsultation implantées en France. De plus, les consultations effectuées par le biais des sociétés de téléconsultation n’étaient pas prises en charge par l’Assurance maladie (hors période Covid).

La période du Covid a permis de développer la pratique des consultations à distance avec un médecin afin de traiter tout problème de santé, marquant un tournant pour les sociétés de téléconsultation.

Avant l’entrée en vigueur du décret du 29 février 2024, les sociétés de téléconsultation avaient la liberté de choisir le tarif applicable aux patients. Celles-ci, en l’absence d’agrément, auront encore la possibilité d’appliquer librement des tarifs hors conventionnement. Cependant, dès la prise en charge par l’Assurance maladie, les sociétés de téléconsultation seront dans l’obligation de se conformer aux tarifs conventionnels prévus à l’article L.162-14-1 du Code de la Sécurité sociale. L’objectif de ce décret est de fixer les modalités d’obtention de l’agrément qui pourra justifier la prise en charge de l’activité de ces sociétés par l’Assurance maladie.

Jusqu’à maintenant, les sociétés de téléconsultation devaient collaborer avec un centre de santé partenaire pour employer des médecins ou établir des factures auprès de l’Assurance maladie. Dorénavant, les sociétés de téléconsultation agréées pourront salarier des médecins. Toutefois, elles devront garantir qu’ils puissent exercer dans le respect des règles déontologiques qui leur sont applicables.

Le décret précise la procédure à suivre afin d’obtenir la délivrance de l’agrément.

La demande est à effectuer auprès du ministère chargé de la santé et de la sécurité sociale, qui le délivre pour une durée de deux ans, renouvelable pour trois ans. Le décret spécifie que la demande de renouvellement est à réaliser dans les mêmes conditions que la demande initiale, au plus tard quatre mois avant le terme de l’agrément en cours.

Afin de solliciter l’agrément, la société de téléconsultation doit remplir les conditions suivantes :

  • Elle doit exercer sous la forme d’une société commerciale régie par le Code du commerce et ayant pour objet de proposer une offre de téléconsultation.
  • Elle ne peut pas être sous le contrôle d’une personne physique ou morale exerçant une activité de fournisseur, de distributeur ou de fabricant de médicaments, de dispositifs médicaux ou de dispositifs médicaux in vitro, à l’exception des dispositifs permettant la réalisation d’un acte de téléconsultation.
  • Elle doit se conformer aux règles relatives à la protection des données personnelles. En effet, le décret précise que les données collectées à l’occasion ou pour les besoins d’une activité de téléconsultation doivent l’être dans le respect des réglementations en vigueur (RGPD).

La société de téléconsultation doit également fournir son numéro SIRET, la description de l’organisation mise en place par la société, une attestation par laquelle le représentant légal s’engage à satisfaire aux conditions requises pour faire la demande susmentionnée, et le certificat de conformité concernant les données personnelles (article L.1470-5 du Code de la santé publique) applicable aux systèmes d’informations et de téléconsultation.

La prise en charge par l’Assurance maladie des téléconsultations effectuées par des sociétés de téléconsultation agréées est subordonnée au respect des tarifs conventionnels. Toutefois, il est possible pour les sociétés de téléconsultation de proposer des services optionnels complémentaires à titre onéreux, sous réserve d’informer préalablement le patient de leur caractère optionnel.

Si des manquements portant atteinte à la sécurité des patients sont constatés, les ministres de tutelles pourront prononcer la suspension immédiate de l’agrément de la société de téléconsultation. Lors de la suspension ou du retrait de l’agrément, l’Assurance maladie ne prendra plus les consultations en charge.

Les sociétés de téléconsultation devront se doter d’un comité médical, dont les modalités sont précisées par le décret.

Le comité médical devra être constitué d’au moins deux médecins salariés et ne pourra compter plus de douze membres. Chaque année, le représentant légal de la société sera entendu par le comité médical afin d’élaborer un rapport d’activité visant à contrôler le respect des obligations qui s’impose à la société de téléconsultation. Ce rapport d’activité sera ensuite transmis au conseil national de l’Ordre des médecins et aux ministres chargés de la sécurité sociale et de la santé.

De surcroît, les médecins membres du comité médical ne peuvent détenir des parts, des actions, des titres ou encore exercer des fonctions dirigeantes au sein de la société qui les salarie.

Un référentiel relatif au décret du 29 février 2024 a été élaboré par la Haute Autorité de Santé (HAS), qui liste les critères définissant les actions devant être réalisées et les moyens devant être mis à disposition par la société de téléconsultation afin que le médecin salarié exerce dans le respect des règles déontologiques liées à sa profession. La demande de renouvellement de l’agrément sera soumise au contrôle du respect du référentiel élaboré par la HAS (Article L.4081-4 du Code de la santé publique).

Le décret tant attendu par les sociétés de téléconsultation concrétise une nouvelle ère pour la médecine moderne. En effet, la prise en charge par l’assurance maladie offre la possibilité aux particuliers d’avoir accès aux soins nécessaires de tout endroit et à tout moment, permettant ainsi de lutter contre les déserts médicaux. Le référentiel de la HAS doit permettre de réguler les nouvelles problématiques liées à ce type de consultation, notamment en termes de sécurité de données.

selas

selas

La 2ème chambre civile de la Cour de cassation a rappelé, dans un arrêt du 1er février 2024 [1], que la dénomination statutaire « comité de surveillance » ne fait pas obstacle à la qualification de leurs membres en tant que dirigeants d’une SAS. A cette occasion, il paraît opportun de rappeler la vigilance qu’il convient d’adopter lors de l’instauration de ces comités ou conseils statutaires au sein des SAS comme au sein des SELAS.

Dans les sociétés par actions simplifiée (SAS), la seule exigence légale relative aux dirigeants est la désignation d’un président pour assurer les fonctions de direction de la société. La liberté statutaire, caractéristique des SAS, permet toutefois de prévoir la mise en place d’autres dirigeants au sein de la société, tels des directeurs généraux ou encore des directeurs généraux délégués.

D’autres organes, notamment collégiaux, peuvent être institués dans les SAS, et revêtir des appellations variées (comité de direction, comité de surveillance, comité stratégique ou consultatif, etc.).

Nonobstant leurs qualificatifs, ces comités ou conseils peuvent être regroupés en deux catégories :

  • Ceux dont une partie des pouvoirs « directionnels » relève habituellement de la compétence du président ; ces organes dotés d’un réel pouvoir de direction peuvent alors s’apparenter au conseil d’administration existant dans les SA ;
  • Ceux qui ont pour mission de contrôler les organes de direction de la société, sans en assumer la direction et la gestion ; ces derniers reçoivent généralement, de la part des dirigeants, un reporting régulier sur l’activité de la société, ou encore proposent voire définissent les orientations stratégiques de la société.

D’autres encore ont parfois un simple rôle consultatif, et rendent des avis préalables à l’adoption de décisions importantes par les dirigeants sociaux.

La Cour de cassation rappelle que la qualification de dirigeants des membres de tels comités doit s’apprécier au regard des prérogatives que les statuts leur confèrent.

Dès lors, si l’attribution de certains pouvoirs permettent de considérer que l’organe concerné s’immisce dans la gestion de la société, il s’agira en réalité d’un organe de direction ; un faisceau d’indices concordant pourra ainsi être retenu afin de qualifier d’organe de direction le comité ou le conseil, notamment dans l’hypothèse où celui-ci participerait activement à la gestion de la société.

A cet égard, il importe peu que le comité ou le conseil soit instauré par les statuts ou par un acte extrastatutaire (tel qu’un pacte d’associés).

Dans les SELAS, une attention particulière doit être portée à l’octroi des pouvoirs et compétences de tels comités ou conseils. En effet, si ces organes – et les membres qui les composent – se voient effectivement conférer ou déléguer certaines attributions appartenant en principe aux dirigeants sociaux, ils pourraient être alors eux-mêmes considérés comme tels.

Or, les dispositions spéciales applicables aux sociétés d’exercice libéral prévoient expressément que leurs dirigeants doivent être désignés parmi les associés exerçant la profession constituant l’objet social.

C’est la raison pour laquelle, dans certains cas, les comités ou conseils institués dans les SELAS devront être composés, à tout le moins majoritairement, par des associés exerçants.

A l’inverse, dans l’hypothèse où les prérogatives du comité ou du conseil en cause seraient de nature purement consultative, rien ne devrait s’opposer à ce que ses membres ne soient pas nécessairement des associés exerçants.

Pour mémoire, à la suite de quatre décisions du Conseil d’Etat du 7 juillet 2023 intéressant les sociétés vétérinaires, une doctrine d’emploi a été établie en concertation avec les groupes vétérinaires et le conseil de l’Ordre des vétérinaires. Selon cette doctrine, la répartition des pouvoirs – notamment décisionnels – entre les différents organes statutaires doit impérativement préserver l’indépendance des vétérinaires.

Ce principe, en vertu duquel le contrôle effectif des sociétés de vétérinaires doit appartenir aux professionnels qui y exercent, a plus largement vocation à s’appliquer à toutes les autres professions libérales réglementées.

Enfin, la reconnaissance du statut de dirigeant de fait d’un comité ou conseil et, par extension, de ses membres, expose ces derniers, en cas de faute, à l’engagement de leur responsabilité civile (dans le cadre de leur gestion) voire pénale (par exemple en cas de procédure collective ouverte à l’encontre de la société et à l’occasion de laquelle des abus seraient constatés).

Dans le cadre particulier de la SELAS, la reconnaissance du statut de dirigeant d’un comité ou d’un conseil qui serait composé de tiers non exerçants, pourrait être interprétée comme portant atteinte à l’indépendance des associés professionnels en exercice et, le cas échéant, exposer à des sanctions disciplinaires.

[1] Cass. Civ. 2, 1er février 2024, 21-25.175

Contrat établissement santé

Contrat établissement santé

 

Les contrats conclus avec les établissements de santé et les cliniques présentent certaines spécificités. Afin d’en améliorer la rédaction et garantir la sécurité juridique, il s’avère donc nécessaire pour les professionnels de santé de mieux comprendre et relire ces contrats d’exercice.

Depuis maintenant plus de 35 années, notre intervention auprès des professionnels de santé nous a permis d’identifier et de répertorier les forces et faiblesses d’un certain nombre de contrats et avenants conclus avec les établissements de santé, et principalement les cliniques.

Lorsqu’on interroge ces professionnels (et notamment les radiologues), leur réponse se veut généralement rassurante quant à la sécurité et la pérennité de l’exercice de leur activité professionnelle auprès de ces cliniques, en vertu de dispositions contractuelles considérées comme protectrices de leurs intérêts… ce n’est pas toujours le cas.

Aussi, les développements qui suivent doivent permettre aux praticiens de disposer de certaines clés de lecture, afin de réexaminer la documentation contractuelle régularisée avec les établissements de santé et de vérifier tant le niveau de sécurité juridique qu’elle leur confère que les modalités de transmission des contrats lors de l’évolution de l’activité (association, fusion, cession, etc.).

LE CARACTERE INTUITU PERSONAE DU CONTRAT

Définition

Si la locution latine intuitu personae n’est pas connue que des juristes, il convient à notre avis d’en rappeler la définition et l’importance, notamment au regard des contrats d’exercice professionnel.

Un contrat intuitu personae est un contrat passé en considération de la personnalité ou de la qualité du ou des cocontractant(s), lesquelles justifient sa conclusion.

Conclusion du contrat d’exercice

S’agissant d’un contrat établi avec une clinique, c’est bien en considération de l’identité et de l’activité de tel ou tel professionnel de santé que l’établissement accepte de conclure le contrat.

De ce point de vue, la forme juridique en vertu de laquelle le professionnel exerce son activité (à titre individuel ou en société) auprès de la clinique ne devrait pas avoir d’importance.

Or, c’est précisément la situation de l’exercice professionnel en société qui est susceptible de générer certaines difficultés, dans la mesure où :

  • lorsque le contrat d’exercice est établi avec le praticien, personne physique, la société n’est pas partie au contrat et ne devrait donc pas pouvoir s’en prévaloir, notamment dans l’hypothèse de la cessation d’activité du praticien ;
  • lorsqu’il est conclu avec la société dans laquelle exerce le praticien, il est fréquent que le contrat ne prévoit pas les situations d’évolution du capital de la société, c’est-à-dire les modifications de l’identité des associés (nouvelle association ou départ à la retraire d’un praticien, regroupement avec une autre société par voie de fusion, etc.).

Il est donc primordial de vérifier si le contrat d’exercice a bien été conclu en considération de la personne du praticien concerné et, dans l’affirmative, d’en apprécier les conséquences sur les conditions de sa poursuite ou de sa transmission.

L’HISTORIQUE DU CONTRAT

Préambule des contrats d’exercice

L’historique des relations contractuelles est généralement rappelé dans le préambule des contrats d’exercice, et peut être utile pour déterminer l’ancienneté du contrat lorsque sa date de formation n’est pas certaine.

La durée du contrat

Connaître précisément la durée du contrat est essentielle que ce soit dans le cadre d’une renégociation de ses conditions voire en cas de rupture du contrat à l’initiative de l’une des parties.

En effet, cette durée peut elle-même permettre de déterminer le montant d’éventuelles indemnités de rupture ou d’arrivée du terme, qui auraient été stipulées dans le contrat.

L’OBJET DU CONTRAT ET L’EXCLUSIVITE

L’exclusivité au praticien

Si l’objet du contrat est facilement identifiable (exercice de la radiologie), il est essentiel de savoir si une exclusivité est accordée au praticien pour réaliser cet objet.

Ainsi, lorsque le praticien est seul à exercer son activité au sein de la clinique, il pourra obtenir une exclusivité d’exercice, ce qui est souvent le cas pour les radiologues.

Pluralité des praticiens 

En revanche, en cas de pluralité de praticiens exerçant une même activité pour le compte de la clinique, l’exclusivité ne pourra évidemment être accordée à aucun d’entre eux.

Deux situations sont alors observées :

  • soit la clinique signe un contrat unique avec l’ensemble des praticiens, simplifiant la situation de la clinique mais contraignant les praticiens à s’entendre entre eux, même s’ils exercent dans des structures juridiques différentes,
  • soit la clinique régularise un contrat avec chacun des praticiens.

Dans ce derniers cas, l’attention devra être portée aux conditions proposées aux autres praticiens avec lesquels la clinique va également contracter, pour autant que cette information soit accessible.

LES CLAUSES D’AGREMENT

Une autorisation préalable

Les clauses d’agrément sont des clauses par lesquelles l’établissement de santé doit donner son autorisation préalable non seulement à toute opération de transmission du contrat, mais parfois encore à toute intégration (association) de nouveaux praticiens au sein d’une structure d’exercice (telle qu’une société d’exercice libéral (SEL)) ou à toute opération de regroupement de structures d’exercice.

Diverses clauses peuvent alors être observées en fonction des situations appréhendées mais, généralement, plus la clinique souhaite que le caractère intuitu personae du contrat soit fort, plus les conditions d’agrément de nouveaux praticiens seront contraignantes.

Ainsi, si le contrat a été conclu en considération de l’identité et de la qualité des praticiens personnes physiques, la clause d’agrément leur imposera, même s’ils exercent en SEL et que le contrat a été conclu avec la SEL, de demander l’agrément de la clinique pour pouvoir associer tout nouveau praticien.

Dans cette hypothèse, ce praticien s’exposera donc à une double demande d’agrément : tant auprès de la SEL, la collectivité des associés devant agréer tout nouvel associé, qu’auprès de la clinique.

Intégration de nouveaux praticiens

A noter que les clauses d’agrément peuvent non seulement viser l’intégration de tout nouvel associé, mais également le recrutement de tout nouveau praticien salarié, collaborateur libéral voire remplaçant devant exercer ses fonctions au titre du contrat signé avec la clinique.

Les délais de la procédure d’agrément auprès de l’établissement de santé, et son formalisme à respecter par les praticiens, sont également un point d’attention à ne pas négliger lors des opérations d’association de nouveaux confrères ou de regroupement avec d’autres structures d’exercice.

Dès lors, les clauses d’agrément peuvent avoir un réel impact sur l’intégration de nouveaux praticiens au sein d’une structure d’exercice, d’autant plus compte tenu des difficultés actuelles de recrutement dans le secteur de la radiologie médicale, rendant quelquefois compliqué la succession entre confrères.

Négociation de la clause d’agrément

La difficulté peut en outre résulter d’un refus d’agrément qui peut être considéré comme injustifié lorsque le futur praticien, dont l’agrément a été sollicité, n’est pas appelé à exercer son activité professionnelle au sein de la clinique concernée mais sur un autre site d’exercice de la société/SEL ; dans ce cas de figure, la clause d’agrément apparaît trop sévère, et doit être négociée en vue d’aménager plus raisonnablement son champ d’application.

L’intervention d’un conseil est alors opportune pour négocier avec la clinique les conditions et modalités d’application de la clause d’agrément, et satisfaire chaque partie au contrat.

Relecture des clauses

Si les praticiens doivent pouvoir conserver la liberté de choisir leurs associés et collaborateurs, il est néanmoins compréhensible qu’un établissement de santé puisse aussi disposer d’un droit de regard – voire de veto – sur l’identité et les compétences des professionnels qui exerceront in situ.

La relecture des clauses d’agrément est donc essentielle pour pallier toute complication qui pourrait naître lors de futures opérations d’association, de cession ou de regroupement (notamment par voie de fusion entre sociétés d’exercice).

LES LOCAUX

Mise à disposition des locaux

En cas d’exercice de l’activité médicale in situ, les dispositions régissant l’occupation des locaux dans lesquels les praticiens exercent pour le compte de l’établissement de santé figurent soit dans contrat de bail soit directement dans le contrat d’exercice.

Lorsque ces dispositions sont insérées dans le contrat d’exercice, un article généralement intitulé Mise à disposition des locaux décrit les modalités les conditions et modalités de l’occupation de ces locaux ; ces dispositions contractuelles se limitent souvent à décrire succinctement les locaux concernés et les charges et coûts y afférents pour les praticiens.

En cas de bail distinct

S’il s’agit d’un bail distinct, il convient alors de veiller à sa cohérence avec le contrat d’exercice, notamment au regard de la durée respective, des conditions de résiliation, des clauses d’agrément, etc.

En principe, la résiliation de l’un devrait entraîner la résiliation de l’autre, ce qui n’est pourtant pas toujours le cas.

Par ailleurs, en cas de contrat de bail distinct du contrat d’exercice, le bailleur ne sera pas forcément la clinique elle-même, mais parfois une société civile immobilière du groupe auquel appartient la clinique.

Si, pour certains, le contrat de bail peut paraître moins essentiel que le contrat d’exercice lui-même, des difficultés d’application combinée des dispositions de chacun de ces contrats ne peuvent être totalement exclues, et sont susceptibles de générer un aléa sur la pérennité de l’activité des praticiens au sein de la clinique.

LE PERSONNEL

Les contrats d’exercice peuvent également traiter du sujet du personnel salarié appelé à travailler dans le cadre du contrat d’exercice. Soit le personnel est employé par la clinique, soit par la société au sein de laquelle exercent les praticiens.

A cet égard, certains contrats d’exercice peuvent être exigeants voire contraignants vis-à-vis des salariés des praticiens ; à titre d’exemple, il n’est pas rare que des cliniques imposent aux salariés des praticiens certaines qualifications particulières ou encore un temps annuel minimal de formation.

En revanche, lorsque le personnel salarié intervenant dans le cadre de l’exécution du contrat d’exercice est employé par la clinique, les praticiens devront porter une attention particulière aux éventuelles obligations qui en résulteront pour eux.

LA DUREE DU CONTRAT

Les praticiens et les établissements de santé peuvent régulariser à leur convenance un contrat à durée déterminée ou un contrat à durée indéterminée.

Contrat à durée indéterminée ou déterminée

Les praticiens ayant signé un contrat d’exercice à durée indéterminée se considèrent bien souvent « super protégés » ; or, cette protection s’avère toute relative puisqu’un contrat à durée indéterminée peut être résilié à tout moment, sous réserve du respect d’un certain préavis.

Un contrat d’exercice d’une durée ferme de plusieurs années peut être ainsi plus protecteur, du point de vue des praticiens, qu’un contrat conclu pour une durée indéterminée.

A titre d’exemple, si un contrat est conclu pour une durée déterminée de 6 ans, et que la clinique décide de mettre un terme à la relation contractuelle au bout de 4 ans, celle-ci devra indemniser les praticiens pour compenser au moins le manque à gagner subi par les praticiens au titre des 2 années de rupture, compte tenu du chiffre d’affaires annuel moyen réalisé avec la clinique.

A l’inverse, si le contrat est à durée indéterminée avec un préavis de 12 mois, la clinique disposera de la faculté de résilier le contrat à tout moment – parfois même au bout de quelques mois d’exercice – moyennant le respect de ce préavis ; des discussions pourront être initiées sur le versement d’une indemnisation des praticiens, sans garantie de succès puisque rien n’aura été prévu dans le contrat.

Négocier la durée d’un contrat à durée déterminée

Pour ces raisons, il convient de privilégier la négociation de contrats dont la durée déterminée sera la plus longue possible ; certains établissements de santé consentent ainsi des durées qui excèdent quelques fois 10 années.

En tout état de cause, si certaines cliniques refusent de consentir tout contrat à durée déterminée, d’autres acceptent de s’engager sur une durée longue, témoignant de leur confiance envers les praticiens et leurs compétences professionnelles.

RESILIATION DU CONTRAT

Les modalités de résiliation des contrats diffèrent selon que le contrat est conclu pour une durée déterminée ou indéterminée.

Résilier un contrat à durée déterminée

En cas de résiliation d’un contrat d’exercice à durée déterminée à l’initiative de la clinique, l’indemnité due aux praticiens est généralement connue puisqu’elle sera calculée sur la base d’une évaluation du chiffre d’affaires non-réalisé par les praticiens pendant la période restant à courir jusqu’au terme du contrat.

Résilier un contrat à durée indéterminée

En cas de résiliation d’un contrat d’exercice à durée indéterminée, les situations divergent : si certains contrats ne listent aucun motif particulier de résiliation, d’autres prévoient des causes de résiliation relativement subjectives, telle que la résiliation pour faute dont les contours – à défaut de définition précise dans le contrat – sont assez flous.

Indemnisation des praticiens

S’agissant de l’indemnisation des praticiens non fautifs en cas de rupture à l’initiative de la clinique, le contrat peut prévoir un mécanisme d’indemnisation mais il n’est pas rare qu’il reste muet sur le sujet et se borne à indiquer le délai de préavis en cas de résiliation.

A l’inverse, des mécanismes de réciprocité indemnitaire se rencontrent parfois et, dans ce cas, les praticiens eux-mêmes peuvent devenir redevables d’une indemnité à l’égard de la clinique en cas de résiliation du contrat d’exercice à leur initiative.

Les praticiens devront réorganiser leur activité professionnelle 

Par ailleurs, la durée du préavis n’est pas anodine pour laisser le temps aux praticiens de réorganiser leur activité professionnelle : la baisse du volume d’activité aura probablement un impact sur la masse salariale, les praticiens devront s’installer dans de nouveaux locaux si l’activité était exercée in situ, etc.

En outre, vérifier la qualité et la capacité de la personne signataire de la résiliation pour le compte de la clinique s’avère parfois utile afin de vérifier si cette personne pouvait valablement agir en son nom.

Enfin, certaines cliniques entendent parfois imposer des clauses de non-concurrence aux praticiens qui n’y exerceront plus leur activité, y compris lorsque la clinique est à l’initiative de la résiliation ; de telles clause doivent naturellement être négociées à l’occasion de la conclusion ou de la révision du contrat, afin de ne pas pénaliser doublement les praticiens.

TRANSMISSION DU CONTRAT

La transmission du contrat d’exercice concerne l’autorisation à donner par l’une des parties à l’autre en cas d’opération juridique de cession, d’apport ou de fusion de l’activité au profit d’un tiers.

Si la cession isolée du contrat d’exercice est une situation assez rare, les opérations d’apport ou de fusion de sociétés dans lesquelles exercent les praticiens sont plus fréquentes et peuvent impacter les conditions d’exécution du contrat.

Cession isolée du contrat d’exercice

Un contrat conclu avec un établissement de santé étant considéré comme un contrat conclu intuitu personae, la cession de son contrat par un praticien nécessitera l’autorisation préalable de la clinique.

Certains contrats contiennent des clauses restrictives obligeant les praticiens à présenter à la clinique plusieurs successeurs dans l’activité, et le mécanisme de l’agrément précédemment exposé trouve à s’appliquer.

Généralement, le refus d’agrément de la clinique – et donc la transmission du contrat au successeur pressenti par les praticiens – est justifié par le fait que la clinique a d’ores-et-déjà sélectionné un successeur.

En tout état de cause, en l’absence d’autorisation de la clinique quant à la transmission isolée du contrat d’exercice, les praticiens seront contraints de poursuivre leur activité pour le compte de la clinique ou, le cas échéant, de cesser cette activité sans bénéficier d’une quelconque indemnisation.

Transmission du contrat en cas de restructuration

Lorsqu’une restructuration juridique concerne la clinique elle-même, sous quelque forme que ce soit (fusion-absorption, scission, cession, etc.), le contrat conclu avec les praticiens est en principe automatiquement transféré au bénéficiaire / à la nouvelle entité juridique exploitant désormais la clinique.

Une telle évolution de la situation juridique de la clinique est souvent prévue dans le contrat d’exercice dont les stipulations peuvent alors prévoir que la clinique serait redevable d’une indemnité à l’égard des praticiens si le contrat d’exercice devait être rompu à cette occasion.

Lorsque la restructuration concerne la société dans laquelle exercent les praticiens (par exemple, hypothèse de sa fusion-absorption par une autre société d’exercice), la transmission automatique du contrat d’exercice n’est absolument pas assurée, compte tenu de son caractère intuitu personae.

Il est donc préférable de prévoir, dans les contrats / avenants régularisés avec les établissements de santé les différentes situations de transmission du contrat d’exercice, inhérente à la réalisation de certaines opérations juridiques.

A défaut, l’autorisation requise de la clinique sera non seulement nécessaire, mais encore un prétexte à d’éventuelles discussions sur la révision des modalités financières de poursuite du contrat.

LA REDEVANCE

Le sujet de la redevance justifierait à lui seul d’importants développements, compte tenu notamment de la jurisprudence pléthorique en la matière.

Il convient de rappeler que beaucoup de contentieux entre les cliniques et les praticiens, quelle qu’en soit la cause initiale, tendent toujours vers une discussion relative à la redevance.

Dans un contexte économique évolutif et incertain, les conditions et modalités de calcul, d’ajustement voire de suppression de la redevance due à la clinique par les praticiens sont régulièrement débattues, et justifient largement l’intervention d’un conseil spécialisé.

OBLIGATIONS D’INFORMATION ET DE COMMUNICATION

Au cours de l’exécution du contrat, les praticiens doivent naturellement s’assurer du respect de leurs obligations contractuelles et notamment celles relatives aux informations et documents à communiquer à la clinique, lors de certaines modifications de la situation juridique de la société dans laquelle exercent les praticiens.

Il peut s’agit de l’association de nouveaux associés, d’un transfert de siège social, de modification de forme sociale, etc.

En effet, en cas de relations médiocres avec la clinique, celle-ci pourrait se prévaloir d’un défaut d’information, du non-respect d’une demande d’agrément ou de toute autre obligation contractuelle pour résilier le contrat, le cas échéant sans aucune indemnité due aux praticiens.

TRANSMISSION AUX ORDRES PROFESSIONNELS

Les professionnels de santé, quelle que soit leur profession, ont l’obligation de communiquer à l’ordre professionnel dont ils dépendent leurs contrats d’exercice, conformément au Code de la santé publique.

Si certains contrats conclus avec les établissent de santé reprennent ces dispositions, d’autres non ; ces obligations demeurent toutefois à la charge des praticiens.

Cette communication doit être réalisée dans le délai d’un mois à compter de la signature du contrat. Il convient de rappeler que le défaut de communication de ces contrats constitue une faute susceptible d’entraîner des sanctions disciplinaires.

Dès lors, si les praticiens constatent qu’un de leur contrat n’a pas été communiqué à l’Ordre, il est conseillé de le transmettre sans délai par lettre recommandé avec demande d’avis de réception.

CONCLUSION

Il faut bien reconnaître que la jurisprudence relative à l’application de ces contrats d’exercice est abondante, et qu’elle trouve souvent son origine soit dans le manquement des parties à leurs obligations contractuelles, soit encore dans une difficulté d’interprétation et d’exécution du contrat généralement liée à une rédaction médiocre de ses clauses.

La clause de recours à la médiation

Afin de limiter le recours au contentieux judiciaire, il est parfois opportun – lors de la conclusion de nouveaux contrats ou de la renégociation de contrats en cours – d’introduire une clause de recours à la médiation.

La médiation est le processus par lequel les parties, avec l’aide d’un tiers médiateur choisi d’un commun accord, tentent par elles-mêmes de régler amiablement leur différend. Si la médiation réussit, cela permet d’éviter une procédure judiciaire qui peut durer plusieurs années et s’avérer très onéreuse pour les parties.

Garantir la sécurité juridique

A titre général, il faut inviter les professionnels de santé à relire leurs contrats d’exercice pour en améliorer la rédaction et garantir la sécurité juridique qu’ils sont en droit d’attendre ; les clauses de ces contrats d’exercice doivent s’accorder avec la réalité et l’évolution de l’activité des praticiens, tout en ménageant les contraintes et les intérêts des établissements de santé.

Les discussions entre praticiens et établissements de santé, qui pourront résulter d’une revue de la documentation contractuelle, devraient être bénéfiques pour chacune des parties : elles permettront d’apporter les améliorations et éclaircissements nécessaires aux clauses essentielles des contrats d’exercice, pour en assurer la parfaite exécution, et seront à n’en pas douter le gage de relations professionnelles et humaines pérennes.

Vétérinaires

A la suite de quatre arrêts du Conseil d’Etat le 10 juillet 2023, le contrôle effectif des sociétés d’exercice de vétérinaires a été placé au cœur des discussions de ces derniers mois.

Le 10 juillet 2023, la 4ème et la 1ère chambre du Conseil d’Etat réunies ont rendu quatre arrêts concernant des sociétés d’exercice vétérinaire appartenant à des grands réseaux (442911, 452448, 448133, 445961) à la suite de plusieurs années de procédures administratives.

Si ces décisions ont eu un tel retentissement, c’est notamment parce que la position du Conseil d’Etat était largement attendue et que les conclusions qui peuvent en être tirées concernent plus largement tous les professionnels libéraux, et pas seulement les vétérinaires.

Les sociétés d’exercice vétérinaire appartenant aux groupes AniCura, IVC Evidensia et MonVeto visées par ces quatre arrêts ont vu les décisions de radiation rendues par l’Ordre des vétérinaires confirmées.

Dans son communiqué de presse du 28 septembre 2023, l’Ordre des vétérinaires a indiqué reprendre toutes les procédures en cours pendantes devant sa juridiction et notifier aux sociétés concernées les radiations administratives prononcées, sans attendre l’issue des pourvois formés.

De très nombreuses cliniques ou cabinets vétérinaires français étant concernés par cette mesure, une procédure de conciliation a été initiée le 9 octobre devant le ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire entre l’Ordre national des vétérinaires, le SNVEL (Syndicat National des Vétérinaires d’Exercice Libéral) et les réseaux concernés par ces procédures afin d’arrêter une méthodologie permettant la mise en conformité de ces sociétés d’exercice vétérinaire.

Durant cette période, l’Ordre des vétérinaires a décidé de sursoir à la mise en application des procédures de radiation des sociétés concernées.

Trois thématiques ressortent de ces décisions :

  • Le contrôle effectif des sociétés d’exercice par les vétérinaires
  • Les professions interdites
  • Le nombre de vétérinaires associés par DPE

L’article L. 241-17 du Code rural et de la pêche maritime (CRPM) dispose que la majorité du capital et des droits de vote des sociétés d’exercice vétérinaire doit être détenue par des associés vétérinaires en exercice.

L’Ordre des vétérinaires et le Conseil d’Etat précisent que ces derniers doivent donc en avoir le contrôle effectif, tant à travers de leurs statuts que des dispositions extrastatutaires qui peuvent exister.

Si les dispositifs visés dans les statuts ou les conventions extrastatutaires sont valables en droit commun des sociétés, la combinaison de certains mécanismes a poussé le Conseil d’Etat à considérer que les vétérinaires étaient privés du contrôle effectif des sociétés d’exercice mises en cause. Le Conseil d’Etat vise notamment les dispositifs suivants :

  • les règles de quorum et/ou de majorité en assemblée générale ne permettant pas aux vétérinaires de prendre seuls des décisions sans l’accord de l’associé investisseur ;
  • la signature de promesses unilatérales de cession des titres du vétérinaire consenties au profit de l’associé investisseur, permettant le rachat à tout moment de ses actions ;
  • la mise en place de comités/conseils (d’administration, de surveillance ou autres) composés de 3 membres dont seul un membre était désigné par les vétérinaires et dont les pouvoirs comprennent notamment la prise de décisions « structurantes pour l’avenir de la société, le choix des investissements ou la création ou la suppression d’un poste de vétérinaire» ;

Toutefois, le rapporteur public a précisé dans ses conclusions que certains mécanismes, selon lui, ne démontraient pas l’influence de l’associé investisseur sur le contrôle de la société d’exercice, notamment :

  • la répartition inégalitaire des droits financiers de la société d’exercice ;
  • la détention par tous les associés vétérinaires en exercice d’une seule action par voie de prêt de consommation à partir du moment où le solde des actions d’exercice est détenu par un vétérinaire.

La détention, directe ou indirecte, de titres de capital d’une société d’exercice de vétérinaires est interdite aux professions suivantes selon les dispositions de l’article L. 241-17 II 2° du CRPM :

« a) Aux personnes physiques ou morales qui, n’exerçant pas la profession de vétérinaire, fournissent des services, produits ou matériels utilisés à l’occasion de l’exercice professionnel vétérinaire ;

 b) Aux personnes physiques ou morales exerçant, à titre professionnel ou conformément à leur objet social, une activité d’élevage, de production ou de cession, à titre gratuit ou onéreux, d’animaux ou de transformation des produits animaux »

Or certains groupes de vétérinaires internationaux réalisent une part significative de leur chiffre d’affaires dans la vente d’aliments (au titre d’une branche d’activité distincte).

Si l’Ordre des vétérinaires considérait que ces groupes avaient donc dans leur capital des « professions interdites », le Conseil d’Etat est venu préciser que les actionnaires indirects d’une personne morale exerçant une profession interdite peuvent détenir des titres d’une société vétérinaire à condition qu’aucun lien d’influence ne soit démontré.

Ainsi une société holding peut valablement détenir (i) des titres dans une société exerçant une profession interdite et (ii) des titres dans une société d’exercice vétérinaire, si aucun lien d’influence n’existe entre ces sociétés sœurs.

Selon l’article R. 242-53 du CRPM, tout vétérinaire inscrit à l’Ordre et en exercice (personne physique ou personne morale) doit avoir au moins un DPE (domicile professionnel d’exercice) et peut en avoir plusieurs.

Le Conseil d’Etat complète ces dispositions et confirme une règle tacite selon laquelle chaque DPE doit être géré par un vétérinaire associé en exercice qui y exerce, a minima, à temps partiel.

Il considère que déléguer de façon permanente la gestion d’un DPE à un vétérinaire salarié ou un collaborateur libéral contrevient aux dispositions de l’article R. 242-66 du CRPM relatif à l’interdiction de faire gérer son DPE.

 

Le 8 décembre, le ministère de l’Agriculture a annoncé dans son communiqué de presse qu’après 5 semaines d’échanges et de réunions de concertation, une doctrine validée par les différentes parties avait pu être établie.

« Cette doctrine comprend 25 points de conseils et recommandations pour, d’une part, garantir la possibilité aux vétérinaires associés qui sont majoritaires d’assurer le contrôle effectif de leurs sociétés et, d’autre part, encadrer l’exercice effectif de la profession de ces vétérinaires associés dans chaque domicile professionnel d’exercice. »

Dès lors, les groupes de sociétés d’exercice vétérinaire disposent de 3 mois pour mettre leurs documents statutaires et extrastatutaires en conformité avec cette doctrine, étant précisé que cette doctrine vise tous les groupes de vétérinaires, et pas seulement ceux concernés par les décisions du Conseil d’Etat.

Sur les distributions de dividendes, il convient d’éviter toute stipulation par laquelle les associés s’engagent à voter favorablement toute distribution, à moins que le montant des investissements soit significativement élevé pendant l’année considérée en proportion du chiffre d’affaires.

A ce titre, il est rappelé que la répartition inégalitaire des bénéfices entre les associés vétérinaire et l’investisseur n’affecte pas l’indépendance professionnelle, sous réserve des clauses léonines.

Sur les majorités en assemblée d’associés, la doctrine rappelle que les décisions habituellement prises à la majorité ordinaire en droit commun des sociétés ne peuvent l’être à une majorité renforcée ou avec un droit de véto de l’investisseur. Les décisions importantes relatives au budget, aux mandataires sociaux ou aux contrats conclus par la société pour une longue durée ne sauraient faire l’objet d’une minorité de blocage par l’investisseur.

Toutefois, les décisions suivantes pourront requérir l’accord de l’investisseur : modification des statuts, opérations de croissance externe ou ayant un impact sur le capital ou l’endettement de la société, augmentation significative de la masse des rémunérations, mise en place ou remboursement d’un endettement.

Également, les clauses prévoyant une double majorité des vétérinaires associés et des deux-tiers des associés en cas d’agrément devraient être évitées.

Sur la constitution d’un comité composé de vétérinaires, la doctrine considère qu’un comité de vétérinaires devrait être constitué afin de permettre aux vétérinaires de se concerter préalablement aux propositions soumises à l’assemblée des associés, notamment sur les décisions exigeant le vote favorable de l’investisseur.

Les membres de ce comité seraient élus par les vétérinaires associés permettant d’organiser les « conditions de l’exercice de leur contrôle effectif et de leur indépendance professionnelle ».

Sur la composition des comités de surveillance ou direction, la doctrine recommande qu’au moins la moitié de ses membres soit des vétérinaires associés en exercice au sein de la société.

Sur les promesses de cession et d’achat des actions détenues par les associés en exercice, la doctrine considère qu’il ne devrait pas être prévu de promesse permettant à l’investisseur de prendre seul la décision de lever la promesse. Cette levée de promesse devrait être limitée aux cas d’interdiction d’exercer de plus de 6 mois, d’incapacité d’exercice de longue durée ou de cessation d’activité du vétérinaire.

Sur les obligations de sortie conjointe, c’est-à-dire lorsqu’un tiers formule une offre sur 100% du capital ou des droits financiers de la société, la doctrine considère qu’elles ne peuvent s’appliquer aux vétérinaires.

Sur la qualité d’associé et le statut de salarié, la doctrine rappelle les arrêts du Conseil d’Etat desquels il ne ressort pas que la qualité d’associé serait incompatible avec celle de salarié.

Sur l’exercice au minimum à temps partiel dans chaque DPE, la doctrine rappelle que :

  • l’exigence de l’exercice par un associé de son activité au moins à temps partiel dans le DPE est indépendante de la quotité de capital détenue ; ces vétérinaires responsables de DPE peuvent bénéficier de prêt de consommation d’actions ; la détention d’un faible nombre d’actions n’exonère en rien des obligations et responsabilité d’associé ;
  • il est attendu du responsable du DPE une contribution effective au service de clientèle et la coordination de l’application des dispositions relatives à l’exercice vétérinaire. Sur ce point, l’Ordre, le SNVEL et les groupes devraient en préciser les notions lors de discussions ultérieures ;
  • la durée minimale d’exercice dans le DPE doit s’entendre de 3 demi-journées par semaine (appréciée par trimestre en dehors des périodes de congés), à adapter en fonction de l’importance du DPE.

En tout état de cause, la portée des décisions du Conseil d’Etat et de cette doctrine sera bien plus large que le secteur vétérinaire et impactera nécessairement toutes les professions de la santé.

Rémunération des associés de SEL

La mise à jour de la doctrine administrative le 15 décembre 2022 relative à l’imposition des rémunérations des associés de SEL n’en finit plus de questionner les professionnels libéraux exerçant leur activité au sein de ces sociétés (BOI-RSA-GER-10-30).

L’administration fiscale considérait, jusqu’à l’année dernière, que les associés de SEL devaient déclarer leur rémunération:

  • conformément aux dispositions de l’article 62 du CGI pour les associés gérants majoritaires de SELARL (société d’exercice libéral à responsabilité limitée) et de SELCA (société d’exercice libéral en commandite par actions);
  • dans la catégorie des traitements et salaires pour les associés de SELAS (société d’exercice libéral par actions simplifiée) et SELAFA (société d’exercice libéral à forme anonyme), sans pour autant relever des dispositions de l’article 62 du CGI (sous-catégorie des traitements et salaires).

Le 15 décembre 2022, l’administration fiscale a mis à jour sa base BOFIP et considère désormais, qu’en l’absence de lien de subordination, les associés (dirigeants ou non) d’une SEL (SELAFA, SELAS, SELARL et SELCA) sont imposés, au titre de l’exercice de leur activité libérale dans cette SEL, dans la catégorie des BNC.

Pour les gérants majoritaires de SELARL et les gérants de SELCA, ces règles s’appliquent aux rémunérations allouées à raison de l’exercice d’une activité libérale, lorsqu’elles peuvent être distinguées des rémunérations qu’ils perçoivent au titre de leurs fonctions de gérant. Dès lors, la rémunération des fonctions techniques des associés est imposée dans la catégorie des BNC et la rémunération des fonctions de la gérance est imposée en application de l’article 62 du CGI.

De nombreuses interrogations ont toutefois été soulevées et, le 16 novembre 2023, l’administration fiscale a apporté certaines précisions lors d’un rescrit formulé par l’Institut des avocats conseillers fiscaux :

  • A compter de l’imposition des revenus 2024, les rémunérations des associés de SEL perçues au titre de leur activité libérale seront bien imposées dans la catégorie des BNC.

Dès lors, les associés devront établir une déclaration 2035 tous les ans mais se pose la question des charges qu’ils pourront déduire à titre personnel. Les associés pourront-ils déduire le même type de charges que la SEL déduisait jusque-là ou seront-ils limités aux seules charges sociales, frais de repas et charges similaires ?

  • Pour ceux des associés de SEL dont le revenu est inférieur à 77.700 €, l’administration fiscale considère qu’ils pourront bénéficier du régime du micro-BNC à compter de l’imposition des revenus 2024.
  • S’agissant de l’assujettissement à la TVA des associés de SEL, l’administration fiscale rappelle que les règles applicables en matière de TVA constituent un corpus de droit autonome, et ne dépendent pas de la catégorie de l’imposition à l’impôt sur le revenu.

Sont soumises à la TVA les livraisons de biens et les prestations de service effectuées à titre onéreux par un assujetti, c’est-à-dire par une personne qui effectue de manière indépendante une activité économique.

L’administration fiscale rappelle que la SEL exerce la profession constituant son objet social par l’intermédiaire de ses associés, qu’elle est seule à en supporter le risque économique, et que les associés ne sont pas directement en rapport juridique avec les clients.

En conséquence, la rémunération des associés de la SEL n’entre pas dans le champ d’application de la TVA.

  • Sur la CFE (cotisation foncière des entreprises), l’administration rappelle qu’elle est due par toute personne exerçant une activité passible de la CFE, quels que soient son statut juridique et la nature de son activité.

Les SEL, qui exercent une activité libérale, sont imposables à la CFE dans les conditions de droit commun.

L’associé de SEL lui, ne sera redevable de la CFE que s’il exerce une activité distincte de celle exercée dans la SEL (pour les professionnels libéraux dont les textes réglementaires le permettent).

  • Sur la possibilité pour un indépendant d’opter pour l’assimilation à l’EURL à l’impôt sur les sociétés, l’administration considère qu’un associé d’une SEL ne peut exercer cette option dans la mesure où il exerce ses actes professionnels pour le compte de la SEL et non pas en nom propre.

Par ailleurs, les associés de SEL devront s’immatriculer afin de permettre la télédéclaration de la 2035. Cette formalité devra être réalisée auprès du guichet unique et un parcours dédié sera établi afin que les SIE distinguent bien les contribuables associés de SEL (dépôt d’une 2035, sans TVA ni CFE) des contribuables exerçant une activité propre.

Cette immatriculation devra être réalisée avant la date limite de dépôt de la déclaration 2035 au titre des revenus 2024, soit au plus tard le 1er mai 2025.

La réponse de l’administration fiscale permet d’éclairer certaines zones d’ombres sur cette nouvelle doctrine.

Ceci étant, de nombreuses questions demeurent en suspens pour les associés exerçant dans les SEL, quelle que soit la profession exercée, dans le secteur de la santé, du droit ou du chiffre.

Sociétés en formation

Le 29 novembre 2023, la Cour de cassation[1] a opéré un changement significatif dans sa jurisprudence concernant les sociétés en formation. Désormais, une fois immatriculée, une société peut reprendre un acte s’il est établi que la commune intention des parties était de la conclure « au nom » ou « pour le compte » de la société en formation, que cela soit expressément mentionné ou non.

Jusqu’à présent, la jurisprudence était constante pour affirmer que seuls les engagements expressément souscrits « au nom » ou « pour le compte » de la société en formation pouvaient être repris par la société après son immatriculation, et que les actes passés « par » la société étaient nuls, même si l’intention des parties était que l’acte soit accompli « au nom » ou « pour le compte » de la société.[2]

La Cour de Cassation considérait comme insuffisantes les mentions indiquant que la société était « en cours d’enregistrement » ou « en cours d’immatriculation » pour établir que l’acte avait été réalisé « au nom » ou « pour le compte » de la société en formation.[3]

Cette jurisprudence avait pour but d’assurer la sécurité juridique et de garantir :

  • d’un côté, la protection du tiers cocontractant en attirant son attention sur la possibilité d’une substitution automatique et rétroactive de débiteur à l’avenir ;
  • de l’autre, la personne qui accomplissait l’acte « au nom » ou « pour le compte » de la société, en lui faisant prendre conscience qu’elle s’engageait personnellement et resterait tenue en l’absence de reprise.

Dès lors, les engagements contractés directement par la société étaient considérés comme non valides, car ils étaient conclus par une société dépourvue d’une personnalité juridique.

La société, ainsi que la personne agissant en son nom, n’étaient pas soumises à l’obligation de prendre en charge l’exécution de l’acte. En revanche, dans le cas d’un acte valable mais non repris, la personne qui agissait « au nom » ou « pour le compte » de la société se trouvait liée, créant ainsi une opportunité pour certaines parties de se libérer de leurs engagements

Cette pratique avait pour effet d’affaiblir les entreprises lors de leur lancement sous forme sociale, plutôt que de les protéger. De plus, elle ne procurait pas une protection suffisante aux tiers cocontractants qui, en cas d’annulation de l’acte, se retrouvaient sans aucun débiteur.

Revirement de jurisprudence de la Cour de cassation

La reprise d’un acte par une société est dorénavant envisageable lorsque l’on peut établir que les parties avaient l’intention commune de le conclure « au nom » ou « pour le compte » de la société en formation, sans nécessiter expressément une telle mention.

Cette décision est un revirement, car elle vient assouplir les règles formelles liées à la reprise des actes.Haut du formulaire

Cependant, la procédure de reprise demeure inchangée et doit être réalisée de l’une des façons suivantes :

  • Résulter de la signature des statuts ;
  • Emerger d’un mandat préalable à l’immatriculation de la société, déterminant la nature ainsi que les modalités des engagements à prendre ;
  • Être issue d’une décision prise à la majorité des associés après l’immatriculation de la société ;

toute reprise implicite étant exclue.

En tout état de cause, le juge a pouvoir de déterminer, en examinant toutes les circonstances, si la volonté partagée des parties était que l’acte soit conclu « au nom » ou « pour le compte » de la société en formation.

[1] Cass. com. 29-11-2023 n° 22-12.865 FS-BR, Cass. com. 29-11-2023 n° 22-18.295 FS-BR, Cass. com. 29-11-2023 n° 22-21.623 FS-BR.

[2] Cass. com. 22-5-2001 n° 98-19.742, Cass. com. 21-2-2012 n° 10-27.630 F-PB, Cass. com. 13-11-2013 n° 12-26.158 F-D, Cass. com. 11-6-2013 n° 11-27.356 F-D, Cass. com. 10-3-2021 n° 19-15.618

[3] Cass. com. 13-11-2013 n° 12-26.158 F-D précité ; Cass. 3e civ. 22-3-1995 n° 93-11.981 D

Ordonnance du 8 février 2023 relative à l’exercice en société des professions libérales réglementées : quelles nouveautés pour les professions de santé ?

L’ordonnance n° 2023-77 du 8 février 2023 relative à l’exercice en société des professions libérales réglementées a été adoptée sur habilitation législative, avec pour ambition de regrouper dans un même texte les dispositions diverses régissant l’exercice en société des professionnels libéraux et de leur donner ainsi une meilleure lisibilité.

Il faut reconnaître que la coexistence de différents textes particuliers applicables à chaque profession concernée, obligeant à conjuguer dispositions spéciales et droit général des sociétés, ne facilite pas la compréhension des praticiens ni la tâche de leurs conseils.

Ajoutons à cela une série de mesures règlementaires prises en application de ces dispositions légales éparses, contrariant parfois leur esprit, et le risque de confusion s’accroît un peu plus.

C’est ainsi que l’ordonnance – qui n’entrera en vigueur qu’à compter du 1er septembre 2024 – refond notamment, sans les révolutionner, les dispositions applicables aux sociétés civiles professionnelles (SCP) et aux sociétés d’exercice libéral (SEL) tout en abrogeant corrélativement les lois[1] qui régissaient ces sociétés.

L’ordonnance organise les règles applicables autour de trois grandes familles de professions libérales réglementées dont elle définit par ailleurs la notion dans son premier article : ces professions « …groupent les personnes exerçant à titre habituel, de manière indépendante et sous leur responsabilité, une activité ayant pour objet d’assurer, dans l’intérêt du client, du patient et du public, des prestations mises en œuvre au moyen de qualifications professionnelles appropriées. »

Sont visées :

 les professions de santé ;

  • les professions juridiques ou judiciaires ;
  • les professions techniques et du cadre de vie réunissant les autres professions libérales réglementées.

Il importe de préciser que de nombreuses dispositions de l’ordonnance sont soumises à des décrets d’application dont les dates de parution ne sont pas connues.

Les principales mesures ci-après synthétisées sont celles intéressant notamment les professions de santé.

Professionnel exerçant

L’ordonnance précise qu’il faut entendre « …par professionnel exerçant la personne physique ayant qualité pour exercer sa profession ou son ministère, enregistrée en France conformément aux textes qui réglementent la profession, et qui réalise de façon indépendante des actes relevant de sa profession ou de son ministère. »

Cette précision est opportune dans la mesure où l’ordonnance, qui reprend en grande partie les dispositions de la loi de 1990 sur les SEL, confère aux seuls professionnels exerçants des prérogatives particulières dans certains domaines (agrément d’associés, conventions sur les conditions d’exercice) ou leur impose – s’agissant des professions de santé – une détention majoritaire du capital et/ou des droits de vote.

Sociétés civiles professionnelles

Peu de changements s’agissant de l’exercice sous forme de SCP, dont le capital social doit toujours être détenu par des personnes physiques exerçant la même profession (contrairement aux sociétés en participation qui peuvent être désormais constituées entre personnes physiques ou morales exerçant une ou des professions libérales réglementées).

Les SCP doivent comporter au moins deux associés, et restent globalement soumises aux dispositions qui figuraient dans la loi de 1966 sur les SCP, avec quelques aménagements marginaux relatifs à la majorité requise en matière de transformation en sociétés d’une autre forme.

Sociétés d’exercice libéral

Un chapitre de l’ordonnance sur les dispositions communes aux SEL (articles 40 à 67 de l’ordonnance) précède les dispositions particulières applicables aux SEL des professions de santé (articles 68 à 79 de l’ordonnance).

Au titre des dispositions communes :

  • les différentes formes de SEL subsistent : SELARL, SELAS, SELAFA, SELCA ;
  • au moins un professionnel exerçant doit être associé de la SEL directement, ou par l’intermédiaire d’une société de participations financières de profession libérale (SPFPL) ;
  • les obligations annuelles d’information et de communication aux ordres professionnels sont renforcées : sont visés l’état de la composition du capital social et des droits de vote, les statuts à jour et les conventions contenant des clauses portant sur l’organisation et les pouvoirs des organes de direction, d’administration ou de surveillance ayant fait l’objet d’une modification au cours de l’exercice écoulé ;
  • des décrets doivent préciser les conditions d’application des dispositions de l’ordonnance sur les SEL, et pourront notamment prévoir (comme c’est le cas aujourd’hui pour les professions de santé) des cas où un associé peut être exclu de la SEL ainsi qu’une limitation au cumul des formes d’exploitation (SEL, SCP, entreprise individuelle).

S’agissant de la détention du capital et des droits de vote, et comme cela était déjà le cas dans la loi de 1990, un principe demeure (articles 46 et 47 de l’ordonnance) :

  • plus de la moitié du capital social et des droits de vote de la SEL doit être détenue, soit directement, soit par l’intermédiaire d’une SPFPL, par des professionnels exerçant au sein de la société ;
  • le complément du capital social et des droits de vote peut être détenu par (i) d’autres personnes physique ou morales exerçant la profession, (ii) des personnes physiques qui, ayant cessé toute activité professionnelle, ont exercé la profession dans la SEL, (iii) les ayants droits de celles-ci, (iv) une SPFPL, (v) des personnes exerçant une profession libérale réglementée de la même famille que celle mentionnée dans l’objet social de la SEL et (vi) des personnes européennes dont l’activité constitue l’objet social de la SEL.

Les mandataires sociaux des SEL (gérants, présidents, directeurs généraux) doivent toujours être désignés parmi les associés exerçant leur activité au sein de la SEL.

L’ordonnance prévoit désormais la possibilité d’insérer dans les statuts des SEL des clauses organisant les modalités du retrait des associés ; cette faculté permet de rapprocher la situation des associés de SEL de la situation des associés de SCP, lesquels bénéficient d’une possibilité de retrait, alors même que les statuts ne la prévoiraient pas.

Au titre des dispositions propres aux professions de santé :

Une dérogation au principe de la détention du capital et des droits de vote énoncé ci-dessus est prévue pour les professions de santé (article 69).

C’est ainsi que plus de la moitié du capital social de la SEL – mais pas des droits de vote, contrairement à ce que laisseraient penser certains commentaires de l’ordonnance – peut aussi être détenue :

  • par tout professionnel exerçant la profession constituant l’objet social de la société ou par toute personne morale (une autre SEL par exemple) exerçant l’objet social de la société ;
  • par des SPFPL, à condition que la majorité du capital et des droits de vote de celles-ci soit détenue par tout professionnel exerçant la profession constituant l’objet social de la SEL ou par toute personne morale ou par une personne européenne, exerçant la profession constituant l’objet social de la SEL.

L’ordonnance apporte une précision importante s’agissant de cette dérogation : des décrets pourront écarter son application « …afin de tenir compte des nécessités propres à chaque profession et dans la mesure nécessaire au bon exercice de la profession concernée, au respect de l’indépendance de ses membres ou de ses règles déontologiques propres. »

Il est probable que certaines professions de santé ne puissent bénéficier de cette dérogation et que les professionnels exerçants concernés doivent consécutivement détenir ensemble plus de la moitié du capital social et des droits de vote de la SEL.

Cette situation est celle déjà connue au sein des SEL de pharmaciens d’officine ou de biologistes médicaux, puisque le Code de la santé publique ne leur permet pas de bénéficier d’une telle dérogation, contrairement à d’autres professions de santé.

Par ailleurs, la question sensible de l’ouverture du capital des SEL des professions de santé à des « tiers » (c’est-à-dire à des personnes physiques ou morales autres que celles mentionnées ci-dessus, et visées aux articles 46, 47 et 69 de l’ordonnance) est traitée à l’article 70 de l’ordonnance.

La lecture de cet article laisse entrevoir une fenêtre de liberté qui sera, à n’en pas douter, rapidement refermée pour certaines professions de santé ; en effet, il est prévu qu’une part demeurant inférieure à la moitié du capital social des SELARL, SELAS et SELAFA puisse être détenue par ces tiers, à condition qu’ils ne détiennent individuellement une part n’excédant pas le quart du capital social.

En l’état, l’ordonnance semble consacrer le principe d’une ouverture du capital aux tiers plus large que celle qui existe actuellement dans la loi de 1990, dont l’article 6 prévoit notamment que dans les SEL « …ayant pour objet l’exercice d’une profession de santé, la part du capital pouvant être détenue par toute personne [les tiers] ne peut dépasser le quart de celui-ci… ».

Afin de tenir compte des nécessités propres à chaque profession, cette ouverture du capital aux tiers est néanmoins subordonnée à la parution de décrets, et il ne serait pas étonnant que les règles actuelles applicables en la matière ne soient pas assouplies (pour mémoire : capital fermé dans les SEL de pharmaciens d’officine ou de chirurgiens-dentistes, ouverture à concurrence du quart du capital dans SEL de biologistes médicaux ou de médecins).

Comme c’est le cas aujourd’hui pour certaines professions de santé, l’ordonnance prévoit également que des décrets pourront limiter le nombre de SEL dans lesquelles une même personne physique ou morale peut prendre des participations, directes ou indirectes.

Enfin, les dispositions spéciales préexistantes relatives à l’agrément des cessions de parts sociales ou d’actions de SEL de professions de santé sont reprises par l’ordonnance, et prévoient toujours le vote des seuls professionnels exerçants (« vote par tête ») lors des assemblées d’associés réunies pour statuer sur un tel agrément.

Dans les SELAS, l’agrément est donné par les associés exerçant leur activité au sein de la société à la majorité des deux-tiers, laquelle est portée à trois-quarts des associés exerçant la profession dans les SELARL.

Sociétés de participations financières de professions libérales

Les dispositions applicables aux SPFPL constituées par des professions de santé sont peu modifiées par l’ordonnance.

Il faut notamment retenir que :

  • leur objet est élargi, puisqu’en plus de détenir des parts ou des actions de sociétés d’exercice et de groupements de droit étranger, ayant eux-mêmes pour objet l’exercice d’une ou plusieurs professions libérales réglementées, les SPFPL pourront détenir, gérer et administrer tous biens et droits immobiliers et fournir des prestations de services sous réserve que ces activités soient destinées exclusivement au fonctionnement des sociétés ou groupements dans lesquels elles détiennent des participations ;
  • dans l’hypothèse où leur objet viendrait à ne plus être rempli, les SPFPL disposeraient d’un délai fixé par décret pour se remettre en conformité avec cet objet, avant que la dissolution ne soit encourue ;
  • une communication annuelle, à l’ordre professionnel auprès duquel chaque SPFPL est inscrite, devra concerner l’état de la composition de son capital social et des droits de vote afférents, ainsi qu’une version à jour de ses statuts, et les conventions contenant des clauses portant sur l’organisation et les pouvoirs des organes de direction, d’administration ou de surveillance ayant fait l’objet d’une modification au cours de l’exercice écoulé ;
  • plus de la moitié du capital et des droits de vote doit être détenue par des personnes, y compris des personnes européennes, qui exercent l’une des professions exercées par la ou les sociétés faisant l’objet d’une prise de participation ;
  • les gérants des SPFPL à responsabilité limitée sont des professionnels exerçants réalisant leur activité au sein de la ou des sociétés dans lesquelles la société de participations financières de professions libérales détient des participations ;
  • le président et les dirigeants des SPFPL par actions simplifiées sont des professionnels exerçants réalisant leur activité au sein de la société ou des sociétés dans lesquelles la SPFPL détient des participations.

Ces deux dernières dispositions semblent moins anodines qu’il n’y paraît, puisqu’elles imposent des règles de gouvernance plus strictes que celles qui existent actuellement, et que leur application pourrait donner lieu à différentes interprétations.

 

[1] Loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 relative aux sociétés civiles professionnelles et loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 relative à l’exercice sous forme de sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé et aux sociétés de participations financières de professions libérales.